Le Rassemblement des Bâtisseurs : un nouveau parti présidentiel dans l’ombre du PDG en crise
Le Gabon vit une transformation politique historique depuis le coup d’État d’août 2023. Porté au pouvoir par la transition, le général Brice Clotaire Oligui Nguema a lancé en janvier 2025 le Rassemblement des Bâtisseurs (RDB), une plateforme citoyenne devenue le fer de lance de sa campagne présidentielle victorieuse (94,85% des voix en avril 2025). Aujourd’hui, sa mutation en parti politique s’opère dans un contexte de déliquescence accélérée du Parti Démocratique Gabonais (PDG), l’ancien parti unique et pilier du régime Bongo pendant 56 ans. Cette évolution soulève une question cruciale : le RDB absorbera-t-il le PDG ?
Fondé comme « mouvement de soutien » à Oligui Nguema, le RDB se présente comme un projet fédérateur transcendant les clivages traditionnels. Il revendique 22 000 adhérents, 4 200 associations et 84 partis ralliés, dont des poids lourds comme l’Alliance Patriotique (Raymond Ndong Sima) et l’Union Nationale (Paulette Missambo). Son récit fondateur s’articule autour de la reconstruction nationale: « Bâtir un Gabon nouveau »*, en rupture avec les pratiques passées. Le discours présidentiel a toujours insisté sur l’unité et la participation citoyenne. La transformation du RDB en parti politique initialement prévue en mai 2025, a été reportée en raison de tensions internes sur son orientation. Sa force réside dans son ancrage territorial et la mobilisation de relais associatifs, mais son succès dépendra de sa capacité à incarner un projet plus qu’un homme – défi inédit dans l’histoire politique gabonaise.
Le PDG : Un géant déchu en quête de survie
Privé de son statut de parti unique en 1990 mais resté hégémonique jusqu’en 2023, le PDG a subi un effondrement systémique post-coup d’État. Ali Bongo en a été démis de sa présidence en mars 2024, tout comme son influente mère, Patience Dabany, exclue du parti avant d’être presque subtilement réhabilitée par les nouvelles instances du PDG. Présidé depuis lors par Blaise Louembé, le parti démocratique gabonais tente une mue pragmatique
Rupture et opportunisme
La crise du PDG a accéléré les transferts d’allégeance : des cadres historiques (dont des membres du gouvernement) ont rejoint les coordinations provinciales du RDB, fragmentant l’ancien parti-État .Son ralliement à Oligui apparaît comme une stratégie de survie plus qu’une adhésion idéologique, révélant un vide programmatique que le RDB cherche à combler.
Absorption du PDG par le RDB : Scénarios et limites
Selon des analystes politiques, Le RDB incarne la nouvelle ère face au PDG associé à l’Ancien Régime. Sa tactique : L’intégration des réseaux locaux du PDG dans le RDB est documentée, notamment via ses coordinations provinciales. Une approche plutôt stratégique: Le projet de « matrice politique » évoqué par le coordinateur général Nzigou suggère un rôle centralisateur avec le risque de marginaliser les partis alliés. Le report de l’assemblée générale du RDB a fini par révéler les clivages entre partisans d’un parti hégémonique et défenseurs d’une plateforme inclusive. Mais l’échec du PDG à absorber l’opposition dans les années 1990-2000 rappelle que les cultures partisanes résistent aux fusions forcées. Si le RDB parvient à incarner une véritable alternative programmatique – et non un simple recyclage d’élites –, il pourrait échapper au sort des partis présidentiels éphémères. Sinon, il rejoindra le PDG au musée des tentatives avortées de renaissance politique gabonaise.