Sur les ruines de Libreville, la survie en ferraille
Deux semaines après les opérations de démolition derrière l’Assemblée nationale et à Plaine Orety, les quartiers rasés sont devenus le terrain de chasse d’une jeunesse débrouillarde. Cuivre, aluminium, ferraille… ici, chaque kilo compte. Reportage dans ce business improvisé, où l’on croise à la fois la résilience et les dilemmes de ceux qui arpentent ces ruines.
Un business hiérarchisé, où la récupération se fait au rythme des arrivées des acheteurs étrangers. Les sociétés chinoises paient au kilo, mais les marges restent étroites. «Ici, on travaille en équipe : les uns repèrent les câbles électriques pour le cuivre, d’autres cassent le béton pour extraire les fers, et moi je supervise les prix avec les Chinois. Si tu veux survivre, tu dois respecter les règles du groupe.», explique Barthélemy Mabicka, au milieu des blocs de ciment.

Phrane, comme beaucoup ici, vit un déchirement : gagner sa vie sur les vestiges d’un déguerpissement qui a frappé les plus précaires. «Franchement, ce n’est pas glorieux… J’ai mal quand je vois des anciens voisins partir et nous, on fouille leurs maisons détruites. Mais sans diplôme, même les petits boulots sont difficiles. Alors… »(soupir) » Nous sommes obligés de le faire »
Une activité qui, malgré tout, offre un semblant de stabilité. Et évite à ces jeunes de sombrer dans l’oisiveté ou la délinquance. «Ça paye pas des masses, mais au moins, tu traînes pas dans la rue à voler ou à fumer. Mon père dit que le travail, même dur, garde digne. Bon… après, faut pas trop calculer !», confie, Junior Ombango membre du collectif des recycleurs
Dans l’attente d’emplois durables, ces ruines sont devenues une ressource. Mais jusqu’à quand ? À Libreville, la ferraille nourrit son homme… sans toujours lui redonner sa fierté.