jeudi 17 juillet 2025
À la uneAfrikExpress

Tchad : Une délégation ministérielle en tournée de « réassurance » après le massacre du Ouaddaï  

Le gouvernement tchadien, accusé de pratiquer une géométrie variable dans le traitement des crises selon l’ethnie ou la région concernée, a enfin décidé de  réagir après le massacre d’une vingtaine de personnes la semaine dernière dans la région  d’Ouaddaï. Sa réponse ? Une délégation ministérielle quatre étoiles, envoyée en mission post-traumatique pour tenter de colmater les fissures de la confiance publique.  

La « dream team » gouvernemental en tournée

  Dirigée par le ministre de la Communication (dont le silence initial avait pourtant parlé plus fort que ses déclarations), la délégation comprenait aussi les ministres de la Sécurité publique et de la Justice. Un casting soigneusement choisi pour donner l’illusion d’une action *holistique* : communiquer, sécuriser… et peut-être même juger, qui sait ?  Leur séjour de trois jours dans la province, ponctué par une visite dans le village endeuillé, avait des allures de mea culpa en forme de ballet protocolaire. « Une preuve que l’État ne fait pas du deux poids deux mesures », a assuré le ministre de la Communication, sans préciser si cette rhétorique incluait aussi le délai de réaction gouvernementale – visiblement calibré selon une mystérieuse grille de priorité.

Silence radio, puis symphonie ministérielle  

Entre les massacres de mardi et jeudi derniers et l’arrivée des ministres ce lundi, les victimes auront eu le temps de compter leurs morts… et les survivants, de mesurer l’ampleur de l’indifférence officielle. Mais rassurons-nous : quand l’État se déplace, c’est en force. Quatre ministres valent mieux qu’un, surtout quand il s’agit d’étouffer les critiques sous un flot de déclarations solennelles.

Ironie de l’histoire : ceux qui réclamaient simplement une reconnaissance rapide de la tragédie se voient offrir une tournée nationale du pouvoir. Comme si la présence soudaine de responsables, après des jours de mutisme, suffisait à effacer les doutes sur l’équité de l’action gouvernementale.

La communication, premier rempart contre les critiques

  Le choix d’envoyer le ministre de la Communication en tête de délégation n’est sans doute pas un hasard. Après tout, à quoi bon régler les problèmes quand on peut les expliquer – ou, à défaut, les noyer dans un discours bien rodé ? « Regardez, nous sommes venus ! », semble dire le gouvernement. Il faut bien se demander  si les populations, elles, verront autre chose qu’une opération de sauvetage… d’image.

Selon les observateurs sur place à Ouaddaï,   aucun mot sur d’éventuelles sanctions contre les auteurs des tueries, ni sur des mesures concrètes pour éviter de nouveaux massacres. Mais chut ! Il ne faut pas trop en demander : pour l’instant, le spectacle de l’État en déplacement doit faire oublier celui de l’État absent.

  Cette délégation aura au moins eu le mérite de rappeler une vérité tchadienne : chez nous, les tragédies se succèdent, mais les ministres aussi. Reste à savoir qui, des deux, laissera la plus longue trace dans les mémoires.

 

Laisser un commentaire