Tchad : 65 ans d’indépendance et un discours aux silences éloquents
À l’occasion des 65 ans d’indépendance ce jour, le président Mahamat Idriss Déby a offert aux Tchadiens son traditionnel discours télévisé. Un exercice de style impeccable : drapeaux flamboyants, promesses de « Tchad nouveau » et rappel de François Tombalbaye, premier président… mais surtout dernier à avoir eu le luxe de mourir libre. Quelle inspiration !
Le mantra anti-corruption : « moralisons ! » (Sauf nos dossiers)
Le chef de l’État a martelé sa nouvelle obsession : « nous devons moraliser la vie publique !» Après 65 ans de gabegie, le régime découvre soudain que détourner l’argent public, c’est mal. Promesse phare : « La lutte contre la corruption sera implacable » … sauf si elle vise un proche du palais, bien sûr. On moralise, mais pas trop.
Deby justifie toutes les restrictions par un argument imparable : « rien n’est possible sans paix et sécurité » Sous-entendu : « laissez-nous gérer les menaces terroristes (et les opposants gênants) sans poser de questions. » La recette magique ? « Mieux équiper nos forces» Autrement acheter des blindés neufs pour mater… euh, protéger le peuple. Priorités.
Le clou du spectacle ? L’absence totale de mention de Succès Masra, l’ex-Premier ministre fraîchement condamné à 20 ans de prison. Silence sur la procédure judiciaire « exemplaire » Aucun mot sur ce « détail » qui trouble la si belle unité nationale Le message est subtil : « La moralisation, c’est pour les autres. »
En ce 65ème anniversaire, le Tchad a droit à un cocktail surréaliste : Un président en saint-justicier (« Je nettoierai la corruption ! ») Un opposant en prisonnier politique (« Quel opposant ? ») Et un public prié d’applaudir sans broncher.
Bonne fête nationale, le Tchad ! moralisons… mais surtout, taisons-nous.